[Bureaux du personnel] C'est grave Docteur? [Clarice]

Aujourd'hui, Léanne avait rendez-vous avec la psychologue de l'Internat. Comme tous les mois en fait. Tous les détenus devaient s'y rendre, et le docteur Staring déterminait si leur "pathologie" évoluait. Mais le problème, c'était que Léanne n'avait pas de pathologie. Elle n'arrêtait pas de lui répéter, de leur répéter, personne ne l’écoutait. Alors forcément, elle ne pouvait pas progresser.

Elle se rendit donc dans le bureau de la psychologue, résolue une fois de plus à la convaincre de la laisser sortir. Ils n'avaient aucune raison de la laisser ici. Elle n'était pas comme tous ces dangereux psychopathes qui la regardaient avec des yeux bizarres. Non, elle elle n'avait rien fait.

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Clarice buvait une tasse de café en étudiant un dossier. Celui de Léanne D'Arc. Petit brin de jeune femme adorable comme tout. Si on enlevait les homicides volontaires et barbares dont elle s'était rendue responsable... et à chaque fois qu'elle la rencontrait, cette dernière tentait de la persuader qu'elle était tout à fait stable, qu'elle ne souffrait d'aucune pathologie...
Pauvre petite... C'était vraiment triste.

Elle referma ledit dossier en soupirant. Ça allait encore mal se passer. Léanne finirait par s'énerver en la voyant inflexible et sceptique quant à ses arguments. Reposant sa tasse de café un peu plus loin, elle entendit qu'on frappait à sa porte. Elle était là.

« Entrez. »

La jeune détenue s'encadra dans la porte et pénétra dans son bureau. La psychologue la gratifia d'un petit signe de tête, et après un sourire lui fit signe de venir s'asseoir.

« Bonjour Léanne. Venez vous installez...

"Bonjour!"

Léanne referma la porte et vint sagement s'assoir devant le bureau de la psychologue. Cette dernière était toujours gentille avec elle, toujours attentionnée. Mais elle ne comprenait juste pas que Léanne allait très bien.

"Vous savez, j'ai vu Nadia sortir de sa chambre la nuit dernière. J'ai entendu du bruit dans le couloir, alors j'ai regardé par la lucarne et je l'ai vue s'en aller. Elle me fait peur Nadia. Elle a quelque chose dans le regard... Je me sens pas rassurée. Je suis pas comme elle vous savez... Je suis pas dangereuse moi."

Elle leva un regard implorant vers l'autre femme. Peut-être que cette fois elle arriverait à la convaincre?

La détenue s'installa devant elle, incarnation de la petite fille modèle, sage comme une image. Le genre qui ne ferait pas de mal à une mouche... Et pourtant... Et pourtant revenait dans la tête de la psychologue les photos des corps des parents et du frère de Léanne D'Arc. Une vraie boucherie... Une boucherie orchestrée par Léanne. Les médecins, lors du procès, avaient reconnu le dédoublement de personnalité de la demoiselle.

Et le plus dur, actuellement c'était de le lui faire comprendre. Lui faire entendre raison. Et ça ce n'était pas gagné du tout... Elle croisa les mains sous son menton en écoutant Léanne lui parler de Nadia. Pas dangereuse elle ? Sans doute plus que Nadia puisqu'elle ne se savait pas violente et un danger pour l'extérieur.

« J'ai en effet entendu dire que Nadia était sortie cette nuit... Je suis heureuse que vous ne suiviez pas le même chemin Léanne. Il ne faut pas traîner dehors la nuit. Comment vous sentez vous en ce moment ? »

Questions d'usage avant d'aller titiller la plaie béante de la détenue...

Ah, au moins elle reconnaissait que Léanne n'était pas un cas comme Nadia.

"Je me sens très bien merci. Mais cet Internat me pèse un peu... Il fait froid et humide ici, je ne me sens pas à l'aise. Je ne comprends pas pourquoi je dois rester... J'aimerais bien rentrer chez moi."

Le docteur devait bien comprendre qu'elle voulait rentrer chez elle... Léanne était encore jeune après tout, et une prison n'était pas un endroit convenable pour une jeune fille. Et puis ses amis devaient l'attendre, quelqu'un les avait prévenus au moins de son départ?

Froid et humide... Pour sûr que ce n'était pas Miami Beach ici. Impossible d'espérer oser se dorer la pilule en sirotant des cocktails ou jouer au beach volley. Grisaille, température peu élevée, et comme elle l'avait dit : il faisait froid.
Cependant Léanne passerait le reste de sa vie ici. Condamnée à perpétuité. À part si un quelconque individu important se débrouillait pour la sortir de là ou pour réduire sa peine, elle pourrirait ici... Comme les autres détenus. Clarice resta songeuse tout en la contemplant puis lui dit d'une voix douce.

« Léanne... Vous savez comme moi pourquoi vous êtes ici et pourquoi vous ne repartez pas... Souvenez vous de ce qui s'est passé Léanne... Rappelez vous vos parents et votre frère.

Léanne perdit tout trace de sourire quand la psychologue se remit à parler. Voilà, elle recommençait. Comme d'habitude.

Léanne se souvenait très bien de ses parents et de son frère. Son petit frère, Caleb, et son air boudeur sous ses boucles brunes. Ah ça, pour être mignon il l'était, tout le voisinage était sous le charme. Par contre quand il était seul avec sa sœur, c'était un vrai petit monstre. Mais ça, personne le savait évidemment. Personne ne voulait la croire. Alors tout le monde adorait Caleb, et elle elle venait après. C'était pareil pour ses parents.

"Oui je me souviens d'eux. Toujours à choyer mon frère, à le couvrir de cadeaux. Il faut dire qu'ils auraient préféré avoir un garçon quand ils m'ont eue, alors quand il est né, c'était une bénédiction. Tout aurait été plus simple si j'avais été un garçon hein..."

Léanne se referma comme une huître à l'évocation de sa famille. Voilà on y était. La jalousie envers son frère. Sans doute un peu justifiée. Comment réagir lorsque son frère était le centre du monde et qu'on peinait à attirer l'attention quoi qu'on fasse ? Ou alors...

« Pourtant ils vous aimaient Léanne, non ? Vous étiez leur enfant... »

La psychologue planta ses yeux dans ceux de la détenue, sans ciller.

« Racontez moi votre souvenir le plus gai lié à votre famille Léanne. Dépeignez moi vos parents et votre frère. Comment étaient-ils ? Étiez vous heureuse avec eux ? »

La faire parler d'elle pour la cerner un peu mieux... Il n'y avait que comme ça qu'elle pouvait essayer de l'aider. Elle ne serait jamais guérie... Mais peut-être un peu soulagée. Et ce serait toujours ça de pris.

"Pourtant ils vous aimaient Léanne, non ? Vous étiez leur enfant... "

"Non. Ils aimaient mon frère. Pas moi."

Ils l'avaient toujours préféré. Alors son souvenir le plus joyeux...

"...C'était avant qu'il naisse. A Noël. J'avais 10 ans, et il y avait même mamie à la maison. Je me souviens, ils m'avaient offert mon ours en peluche... J'étais un peu grande pour ça, mais ça m'avait tellement fait plaisir! Et puis après il est né. Et il a eu plein de peluches, tout le temps. Plein de choses que moi j'avais jamais eues. Et il en profitait, au début il ne se rendait même pas compte de la chance qu'il avait. J'étais heureuse avec mes parents. Pas avec mon frère."

Réponse chronique de la personne qui se sentait délaissée. Réponse subjective bien sûre, mais qui manquait de réalité. Réponse disproportionnée. Clarice avait l'impression de voir une collégienne devant elle. Pas une femme donc. Une adolescente contrariée.

« Plein de choses que vous n'aviez jamais eues ? Mais vous avez pourtant eu des choses qu'il n'a pas eues non ? Des choses exclusivement pour vous Léanne. Un petit effort... »

Lui mentirait-elle en lui prétextant le contraire ? Aurait-elle besoin de lui rappeler son très beau téléviseur pour sa chambre ? Son carnet à dessin ?

« Qu'est ce qui vous déplaisait chez votre frère ? Était-ce physique ou mental ? Ou était-ce simplement le fait de savoir que vous deviez partager vos parents ? Que vous n'étiez plus la seule dans leur cœur ? Pourtant ils vous aimaient Léanne... Ils vous chérissaient... »

"C'est faux!"

A côté de Léanne venait d'apparaître la Dame. C'était ainsi qu'elle appelait cette femme qui venait la voir de temps en temps, toute vêtue de noir, ne laissant jamais voir son visage. La Dame lui parlait quand elle se sentait seule, quand ses parents la délaissaient et qu'elle n'avait personne vers qui se tourner. Elle lui était tellement reconnaissante de la guider quand elle était perdue...

"Comment pouvez-vous savoir qu'ils l'aimaient? Ce petit n'était qu'un monstre. Il ne méritait pas toute cette attention."

[Note : pour l'observateur extérieur c'est toujours Léanne qui parle hein 8D]

Ça y était. Elle se manifestait. L'autre personnalité de Léanne. Tout le contraire de sa jeune amie en apparence inoffensive. Qui parlait d'elle à la troisième personne... ça n'était pas la première fois qu'elle avait affaire à elle. Clarice croisa à nouveau les mains sous son menton tout en détaillant les traits de sa vis à vis. Ses traits s'étaient durcis.

« Un monstre ? Où est ce qu'un bambin de dix ans votre cadet peut-il être un monstre ? Qu'avait-il de monstrueux ? Depuis tout à l'heure je ne cesse de vous poser cette question et vous refusez de me répondre Léanne... Qu'avait donc cet enfant ? N'est ce pas plutôt vous qui avez décidé de le grimer en monstre ? Parce que vous étiez jalouse. »

Là, elle se renfonça dans son siège, les sourcils froncés. Elle allait bien finir par cracher le morceau...

Elle ne la croyait pas. Comme d'habitude. Cela ne cesserait donc jamais? Faudrait-il qu'elle avoue n'importe quoi pour pouvoir enfin avoir la paix? Elle voulait juste s'enfoncer dans son siège, se replier sur elle-même pour ne pas avoir à l'affronter encore une fois.

"Tout ceci n'a rien à voir avec elle. Vous ne comprenez pas."

Léanne était tellement reconnaissante à la Dame de la protéger ainsi. Que ferait-elle sans elle? Où serait-elle aujourd'hui?...

"Ils le méritaient. C'est tout."

La Dame s'était levée et toisait la psychologue d'un air mauvais. Pourquoi elle ne comprenait pas? Pourquoi elle ne l'écoutait pas, comme ses parents?

Non elle ne comprenait pas. Non elle ne pouvait pas comprendre puisqu'elle refusait de parler. Elles refusaient de parler. D'expliquer. C'était comme tenter de parler à un mur. Impossible. À moins d'être maçon, et encore.
Clarice scruta longuement la jeune femme qui venait de se lever. Lui lança un regard polaire. Elle n'était nullement impressionnée. En plus d'être psychologue elle savait se battre. Alors un geste de Léanne...

« Ce que vous ne me dites pas, c'est pourquoi ils le méritaient. Je ne peux pas vous comprendre et vous croire si vous ne m'expliquez pas pourquoi. »

Impossible d'être plus claire.

Non, elle ne voulait pas y repenser, elle ne voulait pas faire remonter ses souvenirs... Elle les avait enfoui il y a bien longtemps, ce n'était pas pour les ressortir à une psychologue de pacotille qui ne comprenait rien.

"Ça suffit. Arrêtez!"

La Dame sortit un long couteau de dessous sa cape. Si la psychologue refusait d'admettre que Léanne allait très bien pour qu'elle sorte, il suffisait qu'il n'y ait plus de psychologue. Problem solved.

Elle se jeta sur elle.

HRP : me demande pas d'où sort le couteau en vrai, je fais n'imp à partir de maintenant 8D

Okay, les limites du jour étaient atteintes. Léanne sortit un couteau d'elle ne sut où. Super la sécurité... les employés n'étaient pas foutus de vérifier qu'aucun détenu ne possédait d'arme. Géant vraiment. Heureusement pour elle, Clarice n'était pas une simple psychologue. Ici, il valait mieux en même temps.
Lorsque la forcenée bondit, elle se rejeta en arrière sur sa chaise et put esquiver cette dernière.
La lame alla se planter juste à côté de la tête de la praticienne, et un de ses poings se dirigea en plein dans le ventre de Léanne. De quoi la sonner le temps nécessaire pour se dégager.