« Mais puisque je te dis, Angie, que ce n’est pas si grave que ça si tu sers les clients sans ton bâton ! Fit Lia d’un ton empreint d’exaspération, les yeux rivés sur sa camarade qui, à quatre pattes, cherchait frénétiquement son accessoire sous l’armoire, les larmes aux yeux.
-Juste deux secondes Lia…Deux petites secondes…. Il n’a pas pu s’envoler tout de même !!! Oh la la !!! C’est pas possible ! Qu’est-ce que je vais faire ?!! La patronne va me virer si elle l’apprend !
-Si tu continues à pleurnicher pour si peu, là oui qu’elle aura des raisons de te virer ! Rétorqua la jeune maid tout en s’empressant d’ouvrir un tiroir de la commode et d’en extirper un bâton en plastique bleu qui trainait entre deux serre-têtes et trois nœuds à ruches de dentelle qu’elle tendit à la hâte à la demoiselle, impatiente de prendre son service, tiens voilà ! Tu n’auras qu’à y coller au bout un croissant de lune en tissu et ça fera l’affaire !
-Tu…tu crois ?
-Mais oui ! Rhooo ! Les clients n’y verront que du feu ! Je pars devant. Les autres sont déjà là-bas : rejoins moi dès que tu as fini, d’accord ?»

Et sur ce, elle lui tourna les talons, les oreilles frémissant de plaisir. Comme d’habitude, la boite se remplissait à une allure fulgurante, vrombissant sous les pas empressés des jeunes karnevaliens désireux de se défouler sur la piste un verre de vodka à la main pour la plus grande joie de la jeune femme, ravie de pouvoir enfin se dégourdir les jambes après une matinée ennuyeuse à souhait à nettoyer de fond en comble son appartement. Elle mourrait d’envie de se montrer en public et de danser. Danser à la folie. Danser toute la nuit. Danser quitte à s’écrouler d’épuisement par la suite, les jambes en charpie, les bras en lambeaux. Une fois de plus, elle brillerait, astre incandescent éblouissant les environs de lumière. Elle rassemblerait les énergies, bondissant, tournoyant, taquinant à tout bout de champ. Et l’on l’acclamerait jusqu’aux premières lueurs matinales en véritable souveraine, objet de tous les regards et de tous les désirs.

Attendues aussi bien du staff que des clients, les soirées à thème donnaient lieu à toutes sortes de divertissements et d’events auxquels les maids se préparaient des jours durant sous l’œil inquisiteur de leur patronne pour qui la moindre erreur n’était pas acceptable. Service, costumes, ambiance….tout devait être absolument parfait afin que la clientèle passe un moment inoubliable au Mid. Aussi comprenait-elle fort bien l’anxiété de sa collègue quant à la perte de l’un des accessoires les plus importants de leur tenue de Magical girl non sans se demander, tandis qu’elle époussetait sa jupette en mousseline rose bonbon avant de se lancer à la conquête de la salle, comment diable cette dernière avait pu être assez étourdie pour ne pas la remettre à sa place après les dernières répétitions du matin….M’enfin à moins que l’une des filles lui ait fait un sale coup, elle était persuadée qu’elle la retrouverait bien vite, ce pourquoi elle pouvait se permettre de chasser ces sombres pensées de sa tête avant de s’engouffrer dans la pièce, exécutant sa petite chorégraphie tout sourire sous les vivats de la foule.

Un jeu d’enfant….d’autant qu’elle était à croquer avec sa mini robe s’accordant merveilleusement bien avec son teint diaphane, ses longues bottes blanches à talons ornées de croissants lunaires pailletés et son diadème en strass encadré de couettes flamboyantes légèrement ondulées lui donnant l’aspect d’une super héroïne venue sauver les pauvres karnevaliens d’un terrible danger ! La démarche aérienne, elle continua son show sans sourciller, passant devant chaque table le sourire aux lèvres en agitant son bâton magique censé apporter bonheur et félicité à ses clients, se trémoussant en cadence avec ses collègues afin de réaliser une ‘’attaque’’ de groupe ou s’empressant de servir un cocktail spécial aux quatre coins du local, glanant au passage des tas d’informations la ravissant au plus haut point. Là ! Quand elle disait qu’elle allait les faire fondre, les cocos ! Elle n’était pas la sublissime Aemilia O’Aodhan pour rien !

Elle parvint alors au niveau du bar, lequel n’était encore occupé que par une demoiselle sirotant tranquillement sa boisson en suivant la scène avec intérêt dont le visage lui semblait vaguement familier. Où avait-elle bien pu la rencontrer ? Surement pas à Karnevale, cela, elle en était bien certaine. A Amenthalys alors ? Probablement vu qu’elle ne mettait qu’occasionnellement les pieds à Opale....

« Bien le bonsoir, mademoiselle ! S’exclama-t-elle après avoir tournoyé sur elle-même, concluant sa danse avec une jolie courbette, En quoi Magical Lia peut-elle vous être utile ce soir ? Aimeriez-vous que je conjure un mauvais sort ? Ou désirez-vous au contraire que j'exauce un de vos souhaits ? »